Les Comités  du Souvenir Français Savoie

Les Actions du Comité d'Albertville

 Hauteluce - Inauguration du monument à la Compagnie du Lac

 Le comité d'Albertville Tarentaise a participé ce vendredi 11 septembre à l'inauguration du monument à la Compagnie de lac, maquis dissimulé au sein du chantier de construction du barrage de la Girotte à Hauteluce. Cérémonie en présence du DMD, d'un piquet du 7° BCA, du maire Xavier Desmaret, de Cécile Cléry-Barraud pour l'ONCAVG, de René Piccard, président des AC de Beaufort et artisan du projet, et de nombreux représentants des familles Bulle et Dodane, descendants ou proches du commandant Jean Bulle.
Merci à Roland Gonthier, porteur du drapeau du comité d'Albertville.

Discours de François Rieu, président du comité d’Albertville Tarentaise

Le monument que nous inaugurons est là pour que personne n’ignore plus l’histoire de ce lieu, des hommes et de leur engagement.
Au nom du Souvenir Français, je veux ici saluer l’engagement de René Piccard et de la commune de Hauteluce pour la création de ce monument, rappelant un épisode paradoxal de la seconde guerre mondiale en Savoie.

Paradoxal, parce que nous ne célébrons ici ni victoire, ni combat, ni victimes, mais l’existence d’un refuge pour de jeunes travailleurs, de jeunes résistants.
Paradoxal, car il s’agit de la création, de l’entretien quotidien et de l’entraînement d’un gros maquis, au cœur même de l’effort de guerre nazi.
Il était vital pour eux de produire de l’énergie et des aciers spéciaux. Chez eux, et dans les pays occupés, pillés pour soutenir le régime hitlérien.
Ici, dès avant la guerre, l’ingénieur Albert Caquot avait imaginé un grand barrage, destiné à augmenter la production des aciéries d’Ugine.
En février 1943, lorsque le gouvernement de Vichy instaura le Service du Travail Obligatoire, Stalingrad venait de tomber. L’Allemagne nazi n’était plus invincible.
Ce fut un espoir pour l’Europe entière.
Ce fut un désastre pour une Allemagne contrainte d’envoyer de plus en plus d‘hommes de tous âges sur le front de l’Est. Pour que l’industrie allemande puisse poursuivre son effort insensé, il lui fallait des travailleurs.
Des millions de prisonniers de guerre.
Des millions de déportés.
Puis les travailleurs du STO. En deux ans, 650 000 travailleurs français partirent en Allemagne.
Beaucoup de jeunes français refusèrent de partir. Certains se cachèrent, ou rejoignirent de petits maquis. D’autres trouvèrent de l’embauche dans des usines et des chantiers français indispensables aux allemands. Les aciéries d’Ugine, et le chantier du barrage de la Girotte faisaient partie de ces sites primordiaux pour l’effort de guerre allemand.
Sous leur véritable identité, ou avec de faux papiers souvent faits par Raymond Bertrand, photographe à Albertville et responsable de l’intendance pour la Résistance dans le secteur, des centaines de jeunes montèrent à la Girotte en 1943 et 1944, travailler pour la Société Métropolitaine et Coloniale.
Grâce à l’entrain de cadres du chantier, dont Albert Escande, de résistants locaux et d’officiers comme le capitaine Jean Bulle, ce village d’hommes regroupés loin de tout, loin des autorités, vit l’esprit de résistance prendre l’ascendant.
Après le débarquement du 6 juin 1944, l’envie d’en découdre prit parfois le dessus sur la raison. Le 19 juin, un groupe de FTP venu d’Ugine entraîna plusieurs jeunes de la Girotte dans l’attaque de la kommandantur de Beaufort. Une victoire de courte durée, les nazis, supérieurs en nombre, en armement et en entrainement capturèrent 35 jeunes résistants. 4 furent déportés. 31 furent fusillés aux Glières Blanches, à Grignon. Parmi eux, 12 réfractaires au STO employés aux aciéries, et 4 venus du chantier de la Girotte.
Pour que la Compagnie du lac soit efficace dans les futurs combats de la prochaine Libération, il fallait de la formation, de l’entraînement et des armes.
Ce ne fut qu’après le massif parachutage aux Saisies le 1er août 1944, encadré par la Compagnie du Lac, que les Résistants du secteur purent se doter d’un armement suffisant pour tenir tête aux allemands.
Sous les ordres du capitaine Escande, la Compagnie du lac participa au sein du bataillon Bulle à de nombreux combats pour libérer la Tarentaise. Plusieurs chasseurs de la compagnie trouvèrent la mort dans ces combats des Chapieux et de la libération de la Tarentaise.
Ce monument est là pour rappeler la mémoire collective de ces soldats de la République. L’histoire est désormais presque lointaine, mais le sens de l’engagement des jeunes de la Compagnie du Lac reste d’une totale actualité.